jeudi 19 janvier 2012

Kronos Quartet à la Biennale de quatuors à cordes




K comme Kronos
K comme kaleidoscope


Mercredi 18 janvier, 20 h 30. Arrivé à peu de choses près à la moitié de la 5e Biennale de quatuors à cordes de la Cité de la Musique, le Kronos quartet, baigné dans une sobre ambiance lumineuse colorée, a tenu le public en haleine pendant près de 2 h 30 dans un programme où il y en avait pour tous les goûts.

La formation démarrait de façon très motorique avec «Aheym», de l’américain Bryce Dessner, une pièce qui s’inscrit ostensiblement dans le sillage de Philip Glass et Steve Reich. On percevait immédiatement le côté bien huilé de la célèbre mécanique américaine à quatre cylindres, tout en espérant secrètement que l'ensemble du concert ne soit pas propulsé exactement de la même manière. 
Suivait un étrange ovni sonore au goût prononcé de bubble-gum, venu sans escale du Canada, intitulé «Death to Kosmische», fruit de la compositrice Nicole Lizée. La lecture des notes de programme de la compositrice nous amènent à croire qu'il s'agit d’une oeuvre à écouter au second degré… et dont les climats sonores portaient en tout cas à sourire !
Pour terminer la première partie du concert‚ création de «Tak-Sim» de l’iranien Alireza Farhang, œuvre élaborée à l’Ircam et cette fois très statique, mais toute tissée de déploiements harmoniques subtils et de délicats effets de moiré.

Retour sur scène avec le très sérieux 7e quatuor «Veränderungen» du compositeur allemand Wolfgang Rihm - figure de proue de cette Biennale - que le Kronos exécutait de manière très éloquente mais aussi avec la préciosité qui convenait lorsqu'il le fallait. 
Court intermède sur un arrangement du très joli «Flow» de Laurie Anderson, extrait de son dernier album Homeland, qui avait été présenté au public dans cette même salle en mars 2010. 
Dernière pièce du programme : l'éprouvant «WTC 9/11» de Steve Reich. Éprouvant à défaut d’être réellement émouvant, car usant jusqu'à la corde du procédé largement développé dans son opéra The Cave, où un ou plusieurs instrumentistes imitent la prosodie mélodique de voix parlées. Ici, l’insistance malheureuse de Reich à superposer systématiquement les échantillons de voix et leur «recopie» instrumentale alourdit considérablement le propos musical.

Comme à l’habitude, le quatuor de San Francisco nous gâtait de plusieurs bis : un savoureux «Egyptian Tango», une reprise de «La Foule» de Piaf avec ami américain chanteur et accordéoniste invité et enfin une reprise de «Don't think twice, it’s alright» de Bob Dylan, réorchestrée pour le Kronos par Philip Glass, et contenant de nombreux effets de slide guitar terriblement kitsch.

Un programme kaleidoscopique et iconoclaste, déconcertant pour certains auditeurs pour qui le quatuor à cordes est un genre sacré très codifié. Mais très réjouissant pour la grande majorité du public, qui remplissait la grande salle de la Cité de musique - qui pour ces concerts redistribue sa géométrie.



La Biennale continue et s’achèvera ce dimanche 22 janvier 2012, avec les formations les plus réputées (quatuors Arditti, Hagen, Diotima, Prazak…) parcourant un répertoire varié (Beethoven, Schumann, Haydn, Brahms, Shostakovitch, Rihm…).



Cité de la Musique,
221 avenue Jean Jaurès
75019 PARIS