lundi 16 novembre 2009

Préampli PASS LABS XP10 - Ecoute




Superposition réalisée pour les besoins de la photo uniquement... Car le XP10 et son compagnon le XA 30.5 doivent pouvoir respirer à l'aise !


L’une des caractéristiques marquantes du XP10 - qui ressort dès les premières minutes d’écoute et se poursuit sur le long terme - est bien une constante douceur dans l’expression, un côté serein qui sied à merveille, par exemple, à un programme baroque. Ce mois de novembre musical aura notamment été placé sous le signe du violoncelle avec la tenue du concours international Rostropovitch et de plusieurs concerts d’hommage au maître et de commémoration de la chute d’un certain mur.

L’occasion de réécouter quelques œuvres composées pour cet instrument, en live, et en l’occurrence pour ce test, au disque : commençons ainsi par le volume consacré au violoncelle au 17e siècle extrait du beau coffret Deutsche Harmonia Mundi, et par les Partitas de Bach qu’il contient également.

Si l’ampli XA 30.5 apporte une belle consistance instrumentale, le préampli XP10 assure de son côté une lecture posée et fluide du message, détaillée mais plutôt du type veloutée. Car cette électronique met bien en perspective – et donc en léger retrait par rapport au message principal - tout ce qu’il est convenu d’appeler micro-informations (respiration des interprètes, coups et frottements d’archet, ambiance de salle). L’insistance est davantage portée sur le respect de la valeur musicale des phrasés, plutôt que sur la mise en avant systématique des artefacts de jeu. Les timbres sont riches et chaleureux, et la restitution se situe à l’opposée d’une lecture froide et hyper définie, souvent spectaculaire mais finalement fatigante avec un tel programme. On pressent déjà que l’écoute de l’ensemble Pass Labs va pouvoir se prolonger de longues et confortables heures !

Très bonne surprise, cette totale absence de crispation et de hâte convient aussi à un registre beaucoup plus moderne, en l’occurrence le magnifique Sleep with angels de Neil Young & Crazy Horse.

Sur le beau titre d’introduction My Heart, le piano bastringue est lumineux et campe merveilleusement la mélodie douce amère, tandis que les coups de grosse caisse chatouillent un bas grave très bien dessiné et qui ne manque pas d’impact. Voila un opus dont la richesse instrumentale – sans oublier bien évidemment le timbre de voix si particulier du rocker canadien – est magistralement mise à l’honneur.

A volume plus élevé, on retrouve bien la notion de profondeur et d’articulation du grave, particulièrement sur le titre Driveby, tandis que la scène sonore se déploie dans toutes les directions avec énormément d’aisance. Sur le morceau Sleep with Angels, déjà plus brut, la guitare caustique et brûlante de Neil Young est rendue avec puissance et densité, mais sans crisper l’auditeur.

Et l’on continue à pouvoir se promener en pensée sans aucune difficulté dans le studio et les cabines d’enregistrement, tant l’aération du message est bien rendue. L’amateur de refrains vénéneux comme seul Neil Young sait en composer est à la fête : l’intelligibilité des paroles est excellente et la musicalité des savantes harmonies est préservée.

Et d’ailleurs, que ce soit avec le dernier Interpol en date (Our love to admire) ou avec le premier et excellent Cake (Fashion nugget), le XP10 n’est jamais à la peine sur du rock. Sa très légère tendance à arrondir les angles permettra d’ailleurs une écoute à volume élevé sans craindre d’être pris à la gorge… tant pis pour les amateurs d’agressivité !

Cuivres rutilants mais sans clinquance, bois et cordes bien palpables, grosses caisses et timbales amples et profondes, exposition de pupitres bien étagés en profondeur…

Telle est l’image sous laquelle éclate l’introduction de la 4e Symphonie de Schostakovitch, avec une dynamique très enviable, mais débarrassée de toute forme d’agressivité en dépit de son caractère furieux. Finalement, pour le grand orchestre aussi, l’aménité qui caractérise le XP10 ne s’accompagne d’aucune frustration pour qui apprécie les œuvres de grande ampleur. On découvrira même ici et là des lignes mélodiques et des traits instrumentaux qui jusque là étaient restés tapis au second voir au troisième plan, et l’on profitera d’une meilleure articulation des motifs principaux.

Par rapport à notre unité de référence, ce préampli offre d’ailleurs une plus grande lisibilité des formations complexes, projette sans violence sur le message retranscrit une lumière faisant bien ressortir les matières, et surtout les articulations musicales. Pour fixer les choses, tout au moins dans le cadre des écoutes effectuées (voir la composition du système), l’équilibre tonal du XP10, marginalement descendant, favorise les registres compris entre le grave et le haut médium, pour se relâcher un peu aux deux extrémités du spectre. Ce très léger effet de présence constitue une bonne partie de son charme.

Conclusion

Loin d’être lénifiante, la restitution empreinte de délicatesse offerte par le préampli XP10 est garante d’une incontestable musicalité sur tous types de programmes, et assure en outre un plaisir d’écoute constant sur le long terme. Si ce préampli n’est pas le plus défini ni le plus dynamique au monde, on est certes bien loin d’une reproduction terne ou molle. Il faudrait plutôt parler de fluidité dans l’analyse et louer sa permanente et lumineuse richesse de timbres. Avec son compagnon le bloc stéréo XA30.5, c’est un monde de finesse et de subtilités qui est révélé, ce qui n’exclut aucunement les coups de semonce ou les frappes percussives réalistes.

Son esthétique sonore est donc à la fois un complément du caractère bien incarné de l’amplificateur XA30.5 (caractéristique partagée par les autres modèles de la gamme) et un garde-fou vis-à-vis d’une option sonore 100 % physique qui négligerait l’essence même du phénomène musical : le respect du légato indispensable une reproduction chantante. Une belle réussite, qui fait de ce maillon un appareil hautement recommandable et plutôt bien placé en prix dans l’absolu…